Les règles du scénario par Pixar

Storytelling pixar : règles 12 et 13

Encore une fois je vous livre cette semaine deux nouvelles règles pour vous aider à écrire votre histoire et vos personnages, vous sortir d’une impasse ou, comme disait un lecteur de ce blog par mail : réussir tout simplement à mettre un point final à son scénario qui traînait depuis des mois…

Voila pourquoi je tiens à garder le contact avec vous toutes les semaines, car d’un article à un autre, vous pouvez trouver la solution à votre problème, donner un nouveau souffle à votre histoire ou simplement vous (re)motiver. Être actif c’est le plus important ! passez à l’action ! n’attendez pas le dégèle, l’idée géniale ou de connaitre parfaitement la présentation d’un scénario ou je ne sais quoi. PASSEZ À L’ACTION MAINTENANT ! 

12) Sortez des sentiers battus

Il faut absolument aller hors des sentiers battus pour explorer des solutions qui sortent de « l’évidence » ! A première vue, cela va à l’encontre même de la règle n°11. Penser/ réfléchir à ses choix et les écarter d’un revers de la main avant même de les avoir essayés est la meilleure manière de se bloquer en essayant de trouver la chose qui vous surprendrait au lieu de trouver une voie qui fonctionnerait.

Vous n’êtes pas les seuls à vous laisser piéger, ça m’est aussi arrivé !

Se forcer à trouver une idée surprenante plutôt que de trouver une idée qui fonctionne.

Attendre la bonne idée, l’idée géniale m’a souvent conduit à mettre mes projets de côté avec la mention : » à revoir plus tard quand j’aurai une idée géniale ». Vous l’aurez compris, il est tout aussi important de tester les premières idées qui vous viennent que les autres car il ne faut rien mettre à la poubelle avant de l’avoir essayé.

Dites-vous que si vous avez eu cette idée, c’est qu’à la base elle doit être intéressante, donc si vous ne savez pas quoi en faire tout de suite, mettez-là de côté, reprenez-là et testez-là. Il n’y a que comme cela que vous pourrez avancer.

anatomie storytelling pixar

Nicescene / Shutterstock.com

« Il est difficile de pouvoir se débarrasser d’une idée sans l’avoir testée »

Puis faites la même chose avec les autres idées jusqu’à ce que quelque chose vous convienne dans la structure ou dans la narration de ce que vous souhaitez raconter. Prenez ça comme un simple exercice. Il est difficile de pouvoir se débarrasser d’une idée sans l’avoir testée, sans savoir si elle fonctionne ou pas et vous pouvez, bien entendu, vous rendre compte, qu’en fait, la première idée était la meilleure. Avec cet exercice vous retirerez deux choses importantes :

  • Vous trouverez plus facilement ce que vous cherchez à exprimer

  • Vous ferez évoluer la vision que vous avez de votre projet en parcourant toutes ces pistes.

Vous n’avez pas besoin que tous les éléments de votre histoire soient nouveaux ou surprenants. Mon très bon ami John August est venu chez Pixar pour donner une conférence sur «  les attentes/ les exigences du (d’un) genre ».

Il expliquait très justement qu’il faut répondre à toutes les attentes qu’a le spectateur d’un genre et qu’il faut choisir très prudemment les éléments inattendus que nous voulons intégrer à l’histoire et les utiliser au bon moment pour surprendre le spectateur sans qu’il ne sorte de l’histoire et que les moments inattendus tombent à plat.

La bonne recette c’est une à deux (maximum) grosses surprises.

Si vous mettez trop de surprises dans votre histoire, vous arriverez au résultat suivant : vous aurez un film étrange, peut-être intéressant intellectuellement parlant, voire intrigant mais vous n’aurez jamais un film satisfaisant émotionnellement parlant pour toucher un large public. L’expérimental et les travaux « visionnaires » c’est très bien.

D’ailleurs ces « genres » sont d’un grand intérêt, ce sont des oeuvres qui ne laissent jamais indifférent le spectateur. Il m’arrive aussi d’en faire. Mais vous devez être en phase avec ce que vous écrivez, le budget que vous avez et pour qui vous l’écrivez, tout doit être cohérent. Les spectateurs préfèrent voir des personnages intéressants plutôt que de nouvelles idées.

« Un bon personnage surpassera toujours l’originalité ! »

Évidemment, nous voulons faire les deux ! Avoir de supers personnages et des idées géniales. Mais au fond, si votre héros et vos personnages ont un arc transformationnel bien construit ou si vos personnages ont une profondeur, cela surpassera une histoire se basant sur des idées originales. En gros, un bon personnage surpassera toujours l’originalité. Vouloir surprendre à tout prix c’est se diriger vers le blocage assuré. Il est impossible de trouver une nouvelle idée à chaque pivot, nœud dramatique ou étape du voyage, dans vos histoires.

Je vous en parlais dans la règle 11, il est toujours préférable d’écrire quelque chose de mauvais plutôt que de ne pas écrire du tout. Si vous êtes discipliné et que vous réécrivez, que vous êtes ouvert d’esprit pour tester vos nouvelles idées, alors commencez par la première idée qui vous vient et vous serez sur la bonne voie pour réussir, que cette idée soit banale, géniale ou une interprétation personnelle d’une idée convenue.

anatomie storytelling pixar

Nicescene / Shutterstock.com

13) Créer des personnages avec un objectif et quelque chose à défendre

Dans vos histoires, cette règle est primordiale ! Cela ne veut pas seulement dire : donner une opinion, mais aussi une direction, des désirs, et des objectifs qui les poussent à passer à l’action. Les conflits, les actes sont à la source de toute narration.

Ils sont les racines de toute œuvre et ne peuvent naître que de l’action des personnages. Si votre héros est passif, c’est la mort assurée de votre histoire, surtout si celle-ci se passe dans un monde complètement inventé (imaginaire), complexe, dont l’auteur est amoureux et laisse de côté ses personnages.

Un monde extraordinairement riche avec des personnages passifs, cela ne sert à rien. Dans ce cas, ce sont les circonstances de l’histoire qui font avancer le héros dans l’histoire et non pas ses actions, c’est à dire sa propre volonté.

Des personnages vides, peu étoffés auront forcément peu d’enjeux, car rien à défendre ou de raison de se battre.

De fait, ils seront aussi moins attachants. Le spectateur aura moins d’empathie (pas ou peu d’identification) que des héros ou personnages qui sont mus par un objectif et des motivations qui emmènent le spectateur dans leurs folles aventures. Les spectateurs viennent voir un film pour ça, voir le héros développer une volonté à toute épreuve et qui leur est propre.

C’est l’essence même de ce qui les rend intéressant, bien plus que le fait de les trouver sympathique ou pas ! D’ailleurs le fait de vouloir absolument que l’on trouve vos personnages sympathiques c’est la racine du problème car vouloir cela à tout prix rend souvent (toujours) vos personnages plus faibles (au point de vue caractère) et plus malléables.

« Les scénaristes pensent que : parce qu’un héros est une simple victime des circonstances, soit à la merci de vilains ou pris au piège d’une situation dangereuse, cela va forcément le rendre sympathique ! »

Cela peut effectivement arriver, mais au fond ce n’est pas l’émotion la plus importante que les spectateurs veulent vivre. Si le spectateur ne ressent que de l’amitié pour le héros, c’est une grossière erreur car c’est le personnage en entier qui doit réussir à les emporter et à les scotcher sur leur siège.

Une intrigue forte peut très bien mettre un héros à la merci des circonstances de l’histoire et du monde dans lequel vous l’avez projeté, mais il faut dans ce cas que le héros ait un objectif ou ait le désir d’aller à l’encontre de ce qui lui arrive. Même les héros les plus rabaissés (nuls, amorphes) doivent lutter contre les éléments extérieurs qui se déchaînent pour s’en sortir. Il n’y a que comme ça que vous ferez croire aux spectateurs que ce personnage mérite de gagner ou d’atteindre son but.

Au début, le héros n’est pas capable de surmonter ce qui lui arrive.

Il ne peut pas résoudre ou vaincre ses ennemis tout de suite. D’ailleurs, c’est ce que le public attend ! Si on présentait un héros capable de venir à bout de tous les problèmes qui surgissent, il n’y aurait pas vraiment d’intérêt au film. Il faut le faire évoluer et c’est là le principe de la dramaturgie.

Il faut que le héros se batte/ lutte pour atteindre son objectif, qu’il soit vainqueur ou pas. D’où l’importance de présenter des héros qui ont du caractère, des opinions fortes qui vont les conduire à prendre des chemins et des décisions pour atteindre leurs objectifs (Pas besoin pour cela d’avoir des objectifs défendant de grandes causes. Un objectif est important dès le moment où il l’est pour le héros.) A ce moment, vous donnerez envie à vos spectateurs de suivre et de s’identifier au héros.

Le biopic d’Iceman

Si je prends le bio pic d’ « Iceman », le « héros » Ritchie est un personnage effroyable et repoussant mais qui réussit à être pour le spectateur un personnage sympathique ! Mais ses obsessions et les conséquences de ses choix font que l’intrigue prend, même si l’histoire de ce personnage n’est pas des plus attrayantes.

Elle réussit à scotcher le spectateur. Lorsque vous créez vos personnages, ne soyez pas gêné par le genre de votre film. C’est à dire que le genre de votre film ne doit pas étriquer la caractérisation de vos personnages. Il ne faut pas que le genre, le rythme ou le ton de votre histoire influence les personnages. Il se peut que votre héros soit très fort, violent etc…et que votre film soit une comédie et pas un film d’action !

Par exemple, une comédie comme : « Pour le pire et le meilleur » ou un drame historique très lent comme : « Oscar et Lucinda » sont bâtis sur des personnages aux opinions et aux objectifs forts. Ces opinions et objectifs sont plus « communs » et humains, au lieu d’être héroïques, épiques et mythiques que s’ils étaient dans un film d’action, mais ils poussent les personnages à être actifs et à avancer.

« Le besoin d’avoir des personnages actifs va bien au delà de la simple idée que «  les personnages passifs sont ennuyeux », même si c’est vrai. »

Mais la chose la plus importante à retenir c’est que les personnages actifs sont obligatoires (nécessaires) parce qu’ils donnent aux spectateurs la possibilité de comprendre le contexte de l’histoire dans son intégralité. Car il n’y a que les personnages qui permettent de raconter une histoire aux spectateurs. L’intérêt du spectateur se focalisera sur les émotions que lui procurent les personnages et rien d’autre.

Si vous prenez l’espace, la matrice de « the Matrix » ou le fonds des océans, ce sont effectivement des endroits qui sont fascinants, mais ils sont tous peuplés de personnages qui nous procurent des émotions et qui ont des opinions et des objectifs forts, et ce quel que soit leur genre : extra-terrestres, pandas ou des voitures !

L’important c’est que nous donnions à ces personnages une caractérisation anthropomorphique qui va permettre aux spectateurs de ressentir à leur tour des émotions et d’être à fond dans ces histoires.

Sans point de vue, un personnage n’a aucun intérêt pour nous.

Nous avons besoin que ses réactions soient en corrélation avec ce qui se passe dans l’histoire que l’on nous raconte. De plus, pour qu’il y ait identification avec le personnage ou que nous réussissions à ressentir des émotions, il faut que nous comprenions ce personnage en partageant ce qu’il ressent.

Si nous ne comprenons pas la vision qu’a le personnage, ses motivations ou ses actions, nous passerons inévitablement à côté de ce qui nous permettrait de comprendre ce que ressent le personnage, pourquoi il le ressent par rapport à ce qui lui arrive. Ici il n’est pas question d’une quelconque formule magique mais plutôt de science cognitive, c’est à dire à la description, l’explication et la simulation de la pensée humaine.

Si les spectateurs voient des personnages ressentir des émotions, ils pourront en tirer de la satisfaction. Au contraire, si les spectateurs ne comprennent pas le point de vue ou la vision des personnages, ce qui les meut et leurs objectifs, ils ne pourront pas ressentir de l’empathie, de la sympathie ni s’identifier à eux.

Voilà pour cet article sur “Les règles d’écriture chez pixar 12 à 13”.

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Tom Weil.

À PROPOS DE TOM WEIL

Tom Weil

Je m’appelle Tom Weil, je suis assistant réalisateur pour le cinéma et la télévision et comme vous pouvez vous en douter je suis passionné de cinéma depuis tout jeune. J’ai crée ce site il y a presque 3 ans maintenant pour vous apporter mon aide…

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